Dossier Sarkozy / financements libyens : les faits de corruption concernant Airbus en Libye face à la justice négociée

Paris, 29 novembre 2022Demain, le Tribunal judiciaire de Paris, validera ou non la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) conclue entre Airbus et le parquet national financier (PNF) concernant des faits de corruption. Ces faits ont été révélés dans le cadre de l’affaire dite du « financements Libyens » de la campagne du président Nicolas Sarkozy.

L’affaire porte sur des faits de corruption que l’entreprise reconnait avoir commis via sa filiale en Libye en 2006 afin de faciliter la conclusion d’un contrat de vente de douze avions à la compagnie Libyenne Afriqyah Airways. Pour rappel, Sherpa s’est constituée partie civile le 26 juin 2013  dans cette procédure d’information judiciaire.

Cette audience à l’occasion d’une question prioritaire de constitutionnalité permet à Sherpa de questionner la conformité aux droits et libertés garantis par la constitution de certains aspects de la justice négociée. Il s’agit d’une première en France : la corruption étant trop souvent, à tort, perçue comme un crime sans victime, le Conseil Constitutionnel n’a encore jamais eu à se prononcer sur la place de la victime dans le cadre d’une CJIP, alors que les entreprises n’ont aucun intérêt à contester l’existence d’un dispositif qui leur est favorable. La présence de Sherpa dans cette procédure en qualité de partie civile permet de représenter le point de vue des victimes et de rendre possible un contrôle de la conformité du dispositif aux droits et libertés garantis par la constitution.

Faisant encore une fois appel à la justice négociée après la première CJIP Airbus conclue en 2020 portant sur des faits de corruption dans plusieurs pays et pour laquelle la société avait été condamnée au paiement d’une amende de 2 milliards d’euros, ce nouvel accord avec le PNF semble vouloir effacer des années de pratiques corruptives. Ce volet de l’affaire des financements libyens est une nouvelle illustration de la tendance néfaste au recours à la justice négociée en matière de corruption. En plus d’instaurer une justice à deux vitesses en faveur des acteurs économiques, elle permet à ces derniers d’acheter leur irresponsabilité.

La CJIP procède en outre à une mise à l’écart des victimes de la corruption, privées de capacité à faire valoir de manière équitable leurs droits et en particulier celui à voir leur dommage justement réparé. Les entreprises ont de fait la pleine maitrise de la procédure, taillée pour servir leurs intérêts.

A la veille de l’audience, Sherpa souligne à nouveau les dangers de la justice négociée en matière de criminalité financière, et du développement d’un droit pénal dérogatoire concernant les entreprises et leurs dirigeants.

Pour en savoir plus sur l’affaire.

Pour plus d’informations : presse@asso-sherpa.org

Affaire France – Libye, de la campagne de Nicolas Sarkozy à la corruption transnationale

Financement libyen : Sarkozy mise en examen pour « association de malfaiteurs »

Paris, le 16 octobre 2020 Nicolas Sarkozy a été mis en examen aujourd’hui pour « association de malfaiteurs », dans le cadre de l’enquête sur les soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007. Cette mise en examen, inédite en France concernant un ancien président, souligne bien la dimension collective des faits qui lui sont reprochés, et permet de mettre l’accent sur le caractère complexe de cette affaire. 

Cette mise en examen intervient peu après un arrêt de la cour d’appel de Paris rendu le 24 septembre, qui a très largement validé l’enquête du juge d’instruction alors que les avocats de Nicolas Sarkozy et de ses anciens ministres Claude Guéant, Eric Woerth et Brice Hortefeux avaient soulevé toute une série de nullités contre ces investigations, parmi lesquelles figurait la constitution de Sherpa comme partie civile.

Pour rappel, l’association Sherpa, dans le cadre de son action contre la criminalité économique et financière internationale, s’était constituée partie civile le 26 juin 2013 à l’occasion de l’information ouverte relative à d’éventuels faits de financements illicites pendant la campagne électorale de Nicolas Sarkozy.

Dans ce dossier, qui concernait jusqu’à présent des faits de « corruption passive », « recel de détournement de fonds publics » et « financement illégal de campagne », le juge d’instruction estime donc qu’il existe des indices quant à l’existence d’une entente entre les différents protagonistes en vue l’obtention du financement illégal dans le cadre de la campagne présidentielle de 2017. Cette nouvelle mise en examen pour « association de malfaiteur » permet de mettre en lumière la difficulté à engager la responsabilité de chacun des personnages politiques de premier plan impliqués, ainsi que l’opacité qui entoure les transactions financières sensibles dans lesquelles ils interviennent.

La présente affaire souligne également l’importance du rôle joué par les associations dans le combat judiciaire visant à lutter contre les transferts de fonds illicites et les pratiques corruptives afin de garantir le respect de l’intégrité de la vie politique et économique dans un espace globalisé.

Pour plus d’information : presse@asso-sherpa.org

Financement de la campagne de Nicolas Sarkozy, Sherpa se constitue partie civile

Paris, le 8 juillet 2013 – L’association Sherpa s’est constituée partie civile le 26 juin 2013 dans le cadre de l’information ouverte relative à d’éventuels faits de financements illicites pendant la campagne électorale de Nicolas Sarkozy. Cette constitution de partie civile s’inscrit dans la droite ligne du combat de Sherpa contre les flux financiers illicites au plan international.

Maître Marie Dose, avocat au Barreau de Paris a été désignée par l’association Sherpa pour se constituer partie civile entre les mains des juges d’instruction désignés à la suite du réquisitoire introductif du Parquet de Paris.

Les faits à l’origine de l’information sont en effet de nature à porter un grave dommage aux institutions démocratiques et au crédit de l’Etat.

Pour plus d’information : presse@asso-sherpa.org

Nos Thématiques

Les Enjeux d’une mondialisation plus juste

Défendre les droits humains et l’environnement : lutter contre les dérives de la mondialisation

À travers ses axes de plaidoyer transversaux et complémentaires, Sherpa poursuit l’objectif d’un monde plus juste centré sur le respect des droits humains et de l’environnement.

Nous proposons une vision de la société au sein de laquelle l’économie est au service des femmes et des hommes et de l’environnement. Un modèle politique et social plus respectueux des communautés, des écosystèmes et des travailleurs et des travailleuses.


Soutenir nos actions

Protéger l’environnement et le climat

Il est temps de reconnaitre que la mondialisation économique est à la source du dérèglement climatique et de la destruction de la biodiversité. Nous ne pouvons plus ignorer le rôle déterminant que jouent les grandes entreprises dans la destruction de nos écosystèmes. Gouverner la mondialisation par le droit passera par la mise en œuvre des responsabilités des acteurs qui polluent la planète et entravent l’accès aux ressources nécessaires à l’ensemble de l’humanité. Sherpa cherche ainsi à établir un droit protecteur de l’environnement et de la nature.


Affaire Bolloré Socapalm


Affaire Perenco : Pollution et opacité


Affaire Casino : Stop à la déforestation


Affaire Total : contentieux climatique


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Protéger les droits des travailleurs et des travailleuses et lutter contre l’esclavage moderne

Les disparités mondiales flagrantes en matière de protection des travailleurs et des travailleuses, qui permettent notamment aux multinationales d’optimiser leurs marges bénéficiaires, favorisent des formes d’exploitations graves par le travail qui touchent principalement les femmes et les enfants.


Travail forcé des Ouïghours

Affaire Samsung


Affaire Vinci au Qatar


Affaire Auchan


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Lutter contre l’impunité des entreprises qui alimentent des conflits armés et des crimes internationaux

Alors que les poursuites et condamnations des auteurs, personnes physiques, de crimes internationaux sont désormais admises tant au niveau international que national, la responsabilité des sociétés, personnes morales, et de leurs dirigeant·e·s, dans la perpétration de crimes n’est quasiment jamais reconnue. Or, les multinationales opérant dans des zones de conflit sont susceptibles d’exacerber des conflits armés et de profiter de violations des droits fondamentaux, notamment en traitant avec des responsables de crimes de guerre et crimes contre l’humanité.


Affaire Lafarge


Affaire BNP Rwanda

Affaire Voltalia

Ventes d’armes françaises au Yemen


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Lutter contre les causes de privation de ressources dans les pays en développement

La lutte contre les flux financiers illicites est un élément clé des politiques de développement et de réduction de la pauvreté. Les pratiques financières illicites menacent la notion d’intérêt général, affectent le fonctionnement des services publics et nourrissent la défiance des citoyen·ne·s à l’égard des gouvernements. À travers ses actions de lutte contre la corruption, le blanchiment et l’évasion fiscale, Sherpa souhaite notamment responsabiliser les acteurs économiques qui permettent la fuite des capitaux des pays du sud et restituer aux États spoliés les sommes détournées. Ces revenus sont indispensables à la fourniture de services publics de qualité et donc à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels.

Cette activité est également profondément liée à nos autres thématiques de protections de l’environnement et des communautés : la criminalité financière étant souvent le corolaire de la criminalité de sang. Notre action a également pour effet de mettre en lumière les liens entre les sommes détournées et blanchies et les atteintes graves aux droits humains ou à l’environnement.


Affaire des « Biens Mal Acquis » de Rifaat al-Assad

Affaire Electrogas Malta Limited : plainte contre plusieurs banques françaises


Affaire France – Libye, de la campagne de Nicolas Sarkozy à la corruption transnationale

Affaire Rio Tinto : corruption dans l’attribution d’un permis de concession minière en Guinée


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Affaire du “financement libyen” : le revirement de Ziad Takieddine rappelle la difficulté pour la justice de faire la lumière dans les affaires politico-financières mais ne fragilise pas le dossier

Paris, le 13 novembre 2020– Dans une interview accordée à Paris Match et BFM-TV, Ziad Takieddine, assure qu’il n’y a « pas eu de financement libyen de la campagne présidentielle » en 2007, mais il maintient avoir remis des fonds à Claude Guéant. Après ces nouvelles déclarations, Sherpa, partie civile dans l’affaire du financement libyen souhaite rappeler quelques faits et principes essentiels dans cette procédure.

Ziad Takkiedine est soudainement revenu sur ses déclarations dans la presse ce jeudi 12 novembre et dédouane désormais non seulement l’ancien président de la République française mais également le défunt Raïs libyen Kadhafi en précisant que ce dernier « ne pouvait le faire parce qu’il ne le faisait jamais » (sic).

Comme le rappelle le communiqué du procureur de la République financier en date du 12 novembre : « Interrogé à six reprises par différents juges d’instruction y compris après le départ de M. Serge Tournaire, M. Ziad Takieddine n’est jamais revenu sur ses premières déclarations ».

Ses nouvelles déclarations apparaissent non seulement peu compréhensibles mais manifestement opportunes alors que la procédure a récemment été validée par la chambre de l’instruction.

Nonobstant les déclarations de l’intermédiaire libanais, de nombreuses preuves matérielles présentes au dossier ont conduit à la mise en examen de l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy pour corruption, détournement de fonds et financement illégal de campagne en 2018 puis pour association de malfaiteur le 16 octobre 2020. Il reviendra aux enquêteurs et aux juges d’instructions saisis d’apprécier le bien-fondé de ces revirements et les circonstances dans lesquelles ils interviennent.

Une mise en examen ne peut être prononcée par un juge d’instruction, magistrat indépendant, au cours d’une information judiciaire, que lorsqu’une personne est soupçonnée d’une infraction pour laquelle il existe des indices graves ou concordants qui ne se limitent pas aux déclarations d’une seule personne.

Le mis en examen, présumé innocent, dispose de droits lui permettant de demander des actes, des témoignages, de contester la procédure ou l’enquête. A juste titre, l’ancien président de la République et ses proches ont usé de ces droits pour remettre en cause l’instruction. Un arrêt de la Chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris rendu le 24 septembre a très largement validé l’enquête alors que les avocats de Nicolas Sarkozy et de ses anciens ministres Claude Guéant, Eric Woerth et Brice Hortefeux avaient soulevé toute une série de nullités contre les investigations, parmi lesquelles figurait la constitution de Sherpa comme partie civile.

D’autre part, l’instrumentalisation médiatique consistant à remettre en cause la compétence et l’indépendance de la justice et des juges d’instruction, comme c’est trop généralement le cas dans ce type de dossier, est extrêmement discutable, qui plus est venant d’un ancien chef de l’Etat. En effet, l’ancien président de la République n’est pas victime d’un procès à son encontre, encore moins d’une machination judiciaire.

La procédure, au stade de l’instruction, doit permettre de déterminer quelles sont les éventuelles implications des différents protagonistes. Le juge d’instruction, dont l’indépendance est inhérente à sa fonction, est soumis au secret de l’instruction et ne peut étaler les preuves dont il dispose sur les plateaux de télévision.

Les affaires de criminalité financière incluant potentiellement des actes de corruption et de détournement de fonds, au niveau international, revêtent un caractère complexe, opaque, et font intervenir de très nombreux acteurs dont il est difficile de déterminer le rôle précis. Le recours à des virements sur des comptes offshores dans des paradis fiscaux, ainsi qu’à des procédés complexes d’ingénierie financière cumulés à l’opacité des circuits financiers sont notamment des moyens privilégiés pour rendre l’administration de la preuve par la justice difficile.

Ces nouvelles déclarations montrent une fois de plus la difficulté pour la justice de mener une enquête dans une affaire politico-financière. Elles ne remettent cependant pas en cause la poursuite de l’information judiciaire.

Sherpa répond aux accusations du JDD

Communiqué de Presse-24 septembre 2019

Sherpa répond aux accusations du JDD [1]

Notre organisation a été une nouvelle fois gravement mise en cause ce 22 septembre dans le Journal du dimanche. Sans aucun fondement, Sherpa se trouve accusée d’instrumentaliser une enquête judiciaire à des fins qui seraient étrangères à son mandat.

Notre accès au dossier sur le financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy est parfaitement légitime : Sherpa étant toujours partie civile dans cette affaire, elle a pu régulièrement accéder au dossier de l’enquête. Les juges n’ont d’ailleurs jamais remis en cause la constitution de l’association dans cette affaire.

Notre transparence sur le sujet résulte notamment de tribune et pétition publiées en mars 2019 qui exposaient clairement la situation au regard de l’obtention de notre agrément.

Sherpa “n’intrigue” nullement est n’est pas un “passager clandestin” dans la lutte contre la criminalité financière. Lutter contre les nouvelles formes d’impunités, qu’il s’agisse des flux financiers illicites ou de la responsabilité des acteurs économiques, guide nos propositions de réformes qui découlent de notre constat quotidien des obstacles nombreux à l’application du droit en matière économique.

C’est dans ce but que, depuis sa création, Sherpa œuvre pour instaurer une véritable responsabilité sociale et environnementale des entreprises et a ainsi contribué à l’adoption il y a deux ans d’une loi sur un devoir de vigilance des entreprises. Sherpa est également à l’origine de l’ensemble des procédures dites des Biens Mal Acquis ayant conduit à un jugement historique du fils de Teodoro Obiang le condamnant pour différents délits financiers (un appel est en cours), et a initié la procédure contre Lafarge et certains de ses responsables, la procédure Vinci Qatar, ou encore la procédure Samsung ayant conduit à la mise en examen de l’entreprise.

Quelles que soient les personnalités mises en cause, les faits présumés notamment de corruption active et passive, de trafic d’influence, faux et usage de faux, d’abus de bien sociaux, blanchiment et recel de ces infractions, complicité de ces infractions, comme ceux de corruption active et passive d’agents publics étrangers, entrent totalement dans le champ de notre action en raison de notre objet social statutaire et de notre expertise reconnue.

En revanche, il semble que la défense d’un ou plusieurs mis en examen dans l’affaire libyenne, relayée par le JDD, voudrait mettre à profit une procédure judiciaire à l’encontre de l’un des administrateurs de la Fondation pour l’Egalité des Chances en Afrique. Cette procédure serait la cause du non-renouvellement de l’agrément.

Or, il s’agit d’une fondation philanthropique belge reconnue d’utilité publique, qui soutient également Human Rights Watch, SOS méditerranée ou encore le prix Nobel de la paix Denis Mukwege. Sherpa a toujours été transparente, comme indiqué sur son site et dans ses rapports d’activités sur ce soutien, au même titre que celui de nombreuses autres fondations.

Sherpa rappelle que cette campagne de dénigrement semble s’inscrire dans une offensive plus générale de rétrécissement de l’action publique dont témoignent les attaques contre Anticor après la mise en examen de M. Ferrand, aux fins de tenter de réduire au silence les associations anticorruption.

Enfin, Sherpa rappelle que Me William Bourdon, personnellement mis en cause dans l’article publié dans le JDD comme il l’a été depuis l’ouverture d’une première enquête visant trois Chefs d’Etat africains en 2007, n’a plus de rôle dirigeant au sein de Sherpa.

Certes sa voix et son expertise continuent de nous aider dans certaines des actions que nous menons mais l’activité de Sherpa est conduite par sa présidente en exercice et sa directrice, signataires du présent communiqué avec le soutien de ses équipes.

[1] https://www.lejdd.fr/Societe/Justice/sarkozy-kadhafi-comment-long-sherpa-a-acces-au-dossier-sans-en-avoir-le-droit-3920997

Oui à l’introduction d’une « Class action » en France !

Paris, le 29 Juin 2012. Le 22 juin dernier, la Ministre de la Justice, Christine Taubira, annonçait vouloir introduire les « class actions » en droit français. Sherpa se réjouit de cette déclaration et suivra avec attention les débats législatifs à venir.

Les class actions, ou actions de groupe, offrent la possibilité pour un grand nombre de victimes ayant subi le même préjudice de se regrouper autour d’un unique recours en justice qui déterminera les dommages et intérêts qui reviendront à chaque plaignant. Elles offrent l’avantage de centraliser les coûts et les risques liés à une procédure judiciaire – lesquels peuvent être rédhibitoires lorsqu’une victime agit individuellement.

Déjà appliqués dans des pays régis par la « Common Law » (États-Unis, Angleterre, Québec), certains de nos voisins européens ont aussi intégré ce concept sous pression de la Commission Européenne (Portugal, Italie, Suède). En France, l’introduction de la class action n’a jamais vu le jour malgré les tentatives successives de Jacques Chirac en 2006, puis de Rachida Dati en 2007 et enfin Luc Chatel en 2008, tous deux sous le mandat de Nicolas Sarkozy.

Sherpa espère que la déclaration de Madame Christine Taubira sera suivie d’un projet de loi ambitieux susceptible de simplifier et d’accélérer le règlement des contentieux de masse que l’association connait bien… Nous pensons ici à l’Affaire COMILOG où, avec l’aide de Sherpa, près de 870 anciens salariés congolais ont saisi le Conseil de Prud’hommes de Paris pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse[1].

Si ce projet venait à aboutir, il s’agirait d’une avancée considérable pour le droit des victimes et d’un contrepoids indispensable à l’impunité dont bénéficient trop souvent les  acteurs les plus puissants de la mondialisation.

William Bourdon, Président de l’association Sherpa, ajoute que l’introduction de la class action « serait de nature à limiter les frustrations qui se manifestent depuis des années en France face à l’impuissance de l’autorité judiciaire à traiter les contentieux de masse, notamment environnementaux et de santé publique ».


[1] Voir : http://www.rfi.fr/actufr/articles/106/article_73310.asp

[Tribune] Pour des contre-pouvoirs

Contribution de William Bourdon au débat “Comment en finir avec les affaires ?”, 6 Octobre 2011

Extraits :

“La corruption, au-delà du délit réprimé par le code pénal, c’est un état d’esprit qui consiste à faire prévaloir ses intérêts privés à l’intérêt général, à défendre son portefeuille, ses privilèges, avant le bien public.

Depuis 2007, Nicolas Sarkozy a voulu décomplexer l’argent. Il a réussi, au-delà de ses espérances, puisqu’il a plutôt décomplexé le conflit d’intérêts, le mélange des genres, les conflits clientélistes…”

Pour aller plus loin : voir l’article du Monde

[Tribune] On ne moralise pas le capitalisme, on le régule

Souvenez-vous des propos de Nicolas Sarkozy lors de son discours de clôture du Grenelle de l’environnement, le 25 octobre 2007 :

« Je veux rouvrir le débat de la responsabilité. […] Il n’est pas admissible qu’une maison mère ne soit pas tenue pour responsable des atteintes portées à l’environnement par ses filiales. »

Il s’agissait d’assurer que le cas Metaleurop ne se reproduise pas. Dans cette affaire (2003), la filiale du groupe spécialisée dans la fonderie de plomb et de zinc n’avait pas les moyens de prendre en charge la réhabilitation de son site de production pollué situé dans le Nord – Pas-de-Calais. La société mère appelée en garantie s’y refusait et, après épuisement de toutes les voies de recours juridiques -sans succès-, les autorités publiques ont dû prendre à leur charge les coûts de dépollution.

Le cas Metaleurop, emblématique sur le plan environnemental, trouve en ce moment son équivalent social avec le tout récent cas Molex. La filiale française de l’équipementier automobile américain vient d’être mise en liquidation le 14 octobre, la société mère annonçant son refus de prendre en charge le plan social.

Le gouvernement français s’est engagé à financer le reclassement de dix-neuf salariés alors même que Martin Slark, PDG de Molex, vient d’annoncer un bénéfice trimestriel record en septembre 2010 et la décision d’augmenter de 14,8% les dividendes.

Ces deux exemples en France illustrent ce que l’état actuel du droit permet aux entreprises transnationales peu scrupuleuses. L’autonomie juridique qui sépare les entités composant un groupe de sociétés empêche aujourd’hui d’appeler en garantie une société mère pour les dommages sociaux et environnementaux générés par ses filiales, mêmes détenues à 100%. Oui à la remonter des bénéfices générés par les filiales, non à la prise en charge des impacts négatifs.

Imaginer l’ampleur des conséquences, lorsque ces entreprises opèrent dans des contextes où l’inacceptable ici (et pourtant subi), est le quotidien.

Des règles pour les multinationales

Ce mercredi 10 novembre, à l’occasion de la Journée européenne contre l’impunité des multinationales, la société civile européenne, notamment dans le cadre d’une campagne « Des droits pour tous, des règles pour les multinationales », en appelle aux forces politiques pour qu’elles reprennent la main et régulent efficacement l’activité des entreprises transnationales.

L’échec de l’autorégulation n’est plus à démontrer. Sans garantie sérieuse de sanction en cas de violation de leurs obligations, les entreprises les plus irresponsables continuent d’adopter des pratiques risquées, dans une logique de « pas vu, pas pris ».

La loi Grenelle 2, censée éviter un nouveau cas Metaleurop, ne résout en rien cette problématique, compte tenu de la lourdeur de la charge de la preuve pesant sur les victimes. En l’état, la promesse de Nicolas Sarkozy lors du Grenelle restera lettre morte. A la veille du G20 présidé par la France, c’est inquiétant !

Les 250 organisations membres de la Coalition européenne pour la responsabilité sociale et environnementale des entreprises (ECCJ) présentes dans quinze pays européens, portent trois propositions :

  • une responsabilité sociale et environnementale contraignante des sociétés mères à l’égard de l’impact négatif de leur filiales, sous-traitants et fournisseurs ;
  • une obligation de transparence sur les performances sociales et environnementales ;
  • la garantie d’accès à la justice au sein de l’Union européenne pour toutes les victimes des activités des entreprises européennes.

Peser les risques environnementaux

L’Union européenne doit mettre sa législation applicable aux entreprises en cohérence avec les valeurs portées par le projet européen. C’est une question de sécurité juridique à la fois pour les victimes mais aussi pour les entreprises. Sans dispositif de sanction adapté, la concurrence déloyale des moins-disants sociaux et environnementaux continuera de l’emporter.

L’association Sherpa contribue avec ces propositions à ce que les performances des entreprises ne se lisent plus uniquement à travers le prisme du résultat financier. En responsabilisant les entreprises pour leurs impacts sociaux et environnementaux, les performances extrafinancières sortiront de leur ghetto.

Quoi de plus prévenant qu’un chef d’entreprise qui pèse les risques financiers d’une opération ? Il doit en être de même pour les risques sociaux et environnementaux. Cela impose de faire sauter les verrous de l’autonomie juridique.

Par Yann Queinnec et Sandra Cossart

Tribune publiée par Rue 89 le 10 novembre 2010.

 

[Tribune] Une obligation de transparence des entreprises

Voici les propos de Nicolas Sarkozy lors de son discours de clôture du Grenelle de l’environnement le 25octobre 2007 : “Je veux rouvrir le débat de la responsabilité. (…) Il n’est pas admissible qu’une maison mère ne soit pas tenue pour responsable des atteintes portées à l’environnement par ses filiales”.

Comme souvent, l’hyper-président réagissait à chaud tant l’opinion publique avait été écœurée par l’affaire Metaleurop. On se souvient que la maison-mère de la filiale française avait déjoué tous les recours juridiques qui vainement avaient tenté de la contraindre d’assurer la réhabilitation de son site de production pollué situé dans le Nord-Pas-de-Calais. Finalement, l’ardoise avait été essuyée par les autorités publiques.

Comment dans ces conditions conférer aux propos que Nicolas Sarkozy tiendra à Séoul en sa qualité de président du G20 une quelconque crédibilité s’agissant de la régulation du marché ?

Une véritable régulation des entreprises multinationales s’impose. En effet, le fiasco de l’autorégulation n’est plus à démontrer, celui des agences de notation aussi. S’agissant de celles qui prétendent labéliser socialement ou éthiquement les entreprises, le scepticisme est légitime puisqu’à nouveau elles notent ceux qui les financent.

Certes, des global managers comprennent que la vertu peut être elle aussi rentable et qu’en étant mieux-disant en terme de responsabilité sociale et environnementale, à long terme on sera gagnant même si l’on perd quelques marchés face à des acteurs des pays émergents qui, en Afrique et ailleurs, font du dumping social, corrompent ouvertement et démonétisent ainsi l’ambition universelle de moraliser de gré ou de force le capitalisme.

Enfin la financiarisation de l’économie et les paradis fiscaux qui continuent à se porter à merveille, parfois en migrant, ne sont pas les moindres ennemis de la régulation des entreprises multinationales. Si beaucoup d’acteurs du marché sont de plus en plus dépendants de leur image éthique – et donc réactifs -, pour l’instant Goldman Sachs et les hedge funds n’en ont cure. Or ce sont ces acteurs financiers qui sont à la fois les plus responsables de la crise et les moins soucieux de la responsabilité sociale et environnementale. La finance éthique continuera à être un oxymore si ces acteurs ne rompent pas avec la logique court-termiste toxique et ne privilégient pas le financement de l’économie réelle.

En responsabilisant les entreprises pour leurs impacts social et environnemental, les performances extrafinancières sortiront de leur ghetto. Les 250 organisations membres de la Coalition Européenne pour la Responsabilité Sociale et environnemental des Entreprises (ECCJ) présentes dans 15 pays européens, portent trois propositions.

Une responsabilité sociale et environnementale contraignante des sociétés mères à l’égard de l’impact négatif de leur filiales, sous-traitants et fournisseurs ; une obligation de transparence sur les performances sociales et environnementales et enfin, la garantie d’accès à la justice au sein de l’Union européenne pour toutes les victimes des activités des entreprises européennes. Toutes ces propositions sont en fait les alliées des entreprises. En effet, tant qu’il n’y aura pas de sanction adaptée, la concurrence déloyale des acteurs les plus cyniques continuera de l’emporter.

En outre, nous voulons favoriser plus de sécurité juridique pas seulement pour les victimes mais pour les entreprises multinationales elle-même. La globalisation des risques fait que l’on ne peut plus se payer de mots.

Rappelons-nous que 60% du commerce mondial s’effectue entre multinationales. C’est pour Nicolas Sarkozy et pour la France, fidèle à son histoire, une opportunité historique d’imposer un mouvement en faveur d’une universalisation d’un droit enfin adapté à ce que la crise financière a révélé.

Par William Bourdon et Yann Queinnec

Tribune publiée par le Monde le 12 novembre 2010.

[Tribune] Il est temps de réguler les multinationales!

« Ce 10 novembre devra être la première Journée européenne contre l’impunité des multinationales: pour qu’enfin les multinationales fassent passer les personnes et l’environnement avant les profits! » écrivent dans leur tribune Bernard Pinaud (CCFD-Terre Solidaire), William Bourdon (Sherpa), Martine Laplante (Les Amis de la Terre France), Jean-Paul Sornay (Peuples Solidaires) et Bernard Salamand (Centre de Recherche et d’Information pour le Développement)

Les catastrophes industrielles, telles la marée noire dans le golfe du Mexique ou encore la coulée de boue rouge toxique en Hongrie mettent en lumière la nécessité d’une régulation pour les multinationales. L’indignation profonde suscitée récemment par ces événements dramatiques, s’ajoutant à celle provoquée par la crise financière, a favorisé, au cœur même du libéralisme, l’adoption d’une loi pour obliger les multinationales cotées à Wall Street à être un peu plus transparentes. Dans le même temps, des initiatives sont prises par certains pays, récemment au Canada, pour rendre ces entreprises – notamment dans le domaine minier – plus responsables des agissements de leurs filiales du fait des dommages écologiques ou sanitaires qu’elles causent dans les pays du Sud.

Dans son discours du 25 octobre 2007 présentant les conclusions du Grenelle de l’environnement, Nicolas Sarkozy avait déclaré: « Il n’est pas admissible qu’une maison mère ne soit pas tenue pour responsable des atteintes portées à l’environnement par ses filiales ». Or, trois ans après, force est de constater qu’on est encore loin du compte.

En particulier, lorsqu’il s’agit d’impacts dans les pays en développement. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, à l’heure où les multinationales font du développement durable leur nouvelle doxa, si la filiale d’une entreprise européenne commet de graves violations des droits de l’Homme ou provoque des dommages environnementaux irréversibles, la responsabilité de tels agissements n’incombe que très difficilement à la société-mère. Et cela, même si cette dernière est la principale bénéficiaire des profits réalisés par sa filiale dont l’autonomie de décision est bien souvent une fiction.

Aucune loi n’impose en effet aux multinationales de rendre compte des impacts de leurs filiales ou de leurs fournisseurs dans d’autres pays. Ainsi, les victimes de ces dommages sont privées de toute réparation. On affiche de la responsabilité au Nord, mais on laisse faire l’irresponsabilité juridique au Sud.

La financiarisation de l’économie, non seulement accentue un décrochage avec l’économie réelle, mais fait des engagements volontaires des multinationales de simples instruments d’un affichage éthique en direction des consommateurs et des autorités publiques.

L’impunité dont bénéficient à ce jour les multinationales est-elle encore acceptable alors que ces acteurs économiques sont très souvent plus puissants que certains Etats dans lesquels ils opèrent? Tandis que, depuis quelques décennies, la communauté internationale pousse à faciliter les échanges commerciaux, aucun cadre normatif international véritablement contraignant n’est venu protéger les personnes et l’environnement contre les possibles impacts négatifs nés de la mondialisation économique.

Alors que nous commémorons aujourd’hui la mort de Ken Saro-Wiwa, écrivain nigérian condamné à la peine capitale pour s’être battu pour la survie du peuple Ogoni et contre les abus d’entreprises pétrolières, les auteurs de la présente tribune en partenariat avec de nombreuses organisations des sociétés civiles à travers toute l’Europe et des pays du Sud, entendent faire du 10 novembre la première Journée européenne contre l’impunité des multinationales: pour qu’enfin les multinationales fassent passer les personnes et l’environnement avant les profits!

Tribune publiée par Médiapart le 9 novembre 2010.

Les multinationales doivent rendre des comptes !

Paris, 14 septembre 2010 – Appel à mobilisation en vue d’une plus grande justice sociale et environnementale

Travail des enfants, expropriation de terres, destruction irréversible des forêts, mépris des normes de santé… Nombre de multinationales se rendent coupables de violations des droits de l’homme ou d’atteintes à l’environnement dans les pays en développement. Parce que leur siège est en Europe et/ou qu’elles se cachent derrière leurs filiales locales, elles agissent dans une quasi-impunité et ne peuvent être attaquées en justice par les victimes de leurs activités.

Des Droits pour Tous, Des Règles pour les Multinationales!

Il s’agit de la campagne lancée ce jour par le réseau Une seule planète et le Forum Citoyen pour la Responsabilité Sociale des Entreprises (FCRSE). Cette campagne vise à sensibiliser l’opinion publique et les décideurs sur la nécessité d’un cadre juridique européen obligeant les multinationales à rendre compte des violations des droits sociaux et des dommages environnementaux dont elles sont à l’origine dans les pays en développement. Elle est coordonnée au niveau européen par la Coalition Européenne pour la Responsabilité Sociale et Environnementale des Entreprises (ECCJ).

Pour assurer la mise en place de ce cadre réglementaire, nous exigeons :

  • que les multinationales européennes soient tenues légalement responsables de tout préjudice qu’elles, ou leurs entreprises affiliées, causent aux personnes et à l’environnement, en Europe comme ailleurs ;
  • qu’elles rendent publiques les informations concernant les impacts de leurs activités ou de celles de leurs filiales sur les personnes et sur l’environnement ;
  • que soit garanti et facilité l’accès à la justice au sein de l’Union européenne pour toutes les victimes des activités des multinationales européennes.

Le contexte est particulièrement propice à une telle mobilisation. Au niveau français et européen, les décrets d’application du Grenelle de l’environnement tout comme la révision de « la directive transparence » sur la publication de données financières ou encore la préparation de la nouvelle communication sur la RSE de la Commission européenne sont en cours de discussion.

Au niveau international, les chefs d’Etats vont se rencontrer à l’occasion du sommet de l’ONU contre la pauvreté du 20 au 22 septembre à New York, dix ans après avoir adopté les « Objectifs du millénaire pour le développement ». Or comment lutter réellement contre les injustices si les entreprises ne sont pas placées elles aussi devant leurs responsabilités ?

***

Au cours de cette campagne, des cas de multinationales européennes dont les activités ont des conséquences humaines, sociales et environnementales dramatiques seront mis en exergue. Une journée européenne d’actions est prévue le 10 novembre, et dès aujourd’hui, la version française de la pétition adressée au Président de la République Française Nicolas Sarkozy et au Président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, est en ligne à l’adresse suivante : www.des-regles-pour-les-multinationales.org/

Pour aller plus loin:

Bruno Ossebi : Un an déjà

2 février 2021 – Il y a tout juste un an, le journaliste franco-congolais Bruno Jacquet Ossebi disparaissait dans des circonstances à ce jour non élucidées.

En ce 2 février 2010, les associations signataires entendent commémorer la disparition de Bruno Jacquet Ossebi, journaliste franco-congolais qui avait fait de la lutte contre la corruption au Congo-Brazzaville un combat personnel.

Que s’est-il passé dans la nuit du 1er au 2 février 2009 ? Rapide retour en arrière.

Le 21 janvier 2009 au petit matin, à Brazzaville, un incendie se déclenche dans la maison qu’occupe Bruno Jacquet Ossebi, avec sa compagne et les deux petites filles (11 et 9 ans) de cette dernière. Toutes trois périssent brûlées vives tandis que Bruno est transporté à l’hôpital militaire de Brazzaville.

Alors même que son état semblait s’être stabilisé et que le ministère français des Affaires étrangères préparait son rapatriement vers la France, Bruno décède subitement dans la nuit du 1er au 2 février.

Bruno Jacquet Ossebi dénonçait de longue date la corruption au sein du régime de Denis Sassou Nguesso, en listant notamment ses « biens mal acquis ». Il avait affiché une détermination sans faille à voir aboutir la plainte pour recel de détournement de fonds publics déposée en France le 2 décembre 2008 contre les familles dirigeantes de trois pays africains, dont celle de Denis Sassou Nguesso. Dès le lendemain du dépôt de cette plainte, Bruno avait sollicité Sherpa afin de savoir de quelle manière il lui serait possible de rejoindre la procédure.

Outre son soutien à l’action menée en France contre les Biens Mal Acquis, Bruno avait peu avant son décès mis en ligne un article sur le journal d’opposition congolais Mwinda.org. Selon cet article intitulé « Pétrole contre poignée de dollars », le Congo et le groupe français BNP Paribas s’apprêtaient à mettre au point un préfinancement pétrolier pour un montant de 100 millions de dollars. Cette pratique est au coeur du pillage des ressources pétrolières congolaises depuis 25 ans, et les autorités congolaises se sont engagées à ne plus recourir à ce type de financement de manière à bénéficier de l’aide du Fonds monétaire international (FMI).

Bruno avait d’ailleurs pris soin d’alerter la Banque Mondiale par un courrier électronique en date du 19 janvier 2009 (soit 2 jours avant l’incendie déclenché à son domicile).

Selon l’enquête menée par Reporters sans frontières, le domicile de Bruno a été rasé moins de quatorze heures après l’incendie alors même qu’aucune expertise n’avait été pratiquée sur les lieux du sinistre. Le corps de Bruno Ossebi n’a fait l’objet d’aucune autopsie. Tous les éléments qui auraient permis de comprendre ce qui s’est passé dans les nuits du 20 janvier et du 1er février ont donc été effacés. D’après le Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ), les autorités congolaises refusent de fournir la moindre information sur les résultats de l’enquête ouverte le 25 février 2009.

Les associations signataires restent extrêmement préoccupées par les circonstances de son décès, par l’inertie dont font preuve les autorités judiciaires congolaises, et par le silence des autorités françaises s’agissant d’un ressortissant français.

Elles dénoncent le contexte de répression qui sévit au Congo-Brazzaville à l’encontre des acteurs de la société civile.

Elles appellent Nicolas Sarkozy à s’engager personnellement pour que toute la lumière soit faite sur cette affaire, et ce, avant la venue programmée de son homologue congolais lors des festivités du cinquantenaire des indépendances africaines, le 14 juillet prochain.

Sherpa, Survie et le CCFD-Terre Solidaire s’inquiètent des modalités selon lesquelles le FMI et la Banque mondiale ont décidé, le 28 janvier 2010, de procéder à l’annulation de la dette congolaise, à hauteur de 1,9 milliard de dollars. Cette décision, véritable chèque en blanc à un régime toujours aussi opaque et autoritaire, sonne comme une insulte à la mémoire de Bruno Ossebi un an après sa mort.

Il y a tout juste un an, le journaliste franco-congolais Bruno Jacquet Ossebi
disparaissait dans des circonstances à ce jour non élucidées
En ce 2 février 2010, les associations signataires entendent commémorer la disparition de Bruno
Jacquet Ossebi, journaliste franco-congolais qui avait fait de la lutte contre la corruption au Congo-
Brazzaville un combat personnel.
Que s’est-il passé dans la nuit du 1er au 2 février 2009 ? Rapide retour en arrière
Le 21 janvier 2009 au petit matin, à Brazzaville, un incendie se déclenche dans la maison qu’occupe
Bruno Jacquet Ossebi, avec sa compagne et les deux petites filles (11 et 9 ans) de cette dernière.
Toutes trois périssent brûlées vives tandis que Bruno est transporté à l’hôpital militaire de Brazzaville.
Alors même que son état semblait s’être stabilisé et que le ministère français des Affaires étrangères
préparait son rapatriement vers la France, Bruno décède subitement dans la nuit du 1er au 2 février.
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Bruno Jacquet Ossebi dénonçait de longue date la corruption au sein du régime de Denis Sassou
Nguesso, en listant notamment ses « biens mal acquis »1. Il avait affiché une détermination sans faille
à voir aboutir la plainte pour recel de détournement de fonds publics déposée en France le 2 décembre
2008 contre les familles dirigeantes de trois pays africains, dont celle de Denis Sassou Nguesso. Dès
le lendemain du dépôt de cette plainte, Bruno avait sollicité Sherpa afin de savoir de quelle manière il
lui serait possible de rejoindre la procédure.
Outre son soutien à l’action menée en France contre les Biens Mal Acquis, Bruno avait peu avant son
décès mis en ligne un article sur le journal d’opposition congolais Mwinda.org. Selon cet article intitulé
« Pétrole contre poignée de dollars », le Congo et le groupe français BNP Paribas s’apprêtaient à
mettre au point un préfinancement pétrolier2 pour un montant de 100 millions de dollars. Cette pratique
1 Il animait le site congo-biensmalacquis.over-blog.com et avait eu des contacts avec le CCFD-Terre Solidaire qui élaborait
alors son rapport sur les biens mal acquis (www.ccfd.asso.fr/BMA).
2 Un préfinancement pétrolier consiste à accorder un prêt à un Etat moyennant un droit de gage sur la production de barils
de pétrole brut à venir.
est au coeur du pillage des ressources pétrolières congolaises depuis 25 ans3, et les autorités
congolaises se sont engagées à ne plus recourir à ce type de financement de manière à bénéficier de
l’aide du Fonds monétaire international (FMI). Bruno avait d’ailleurs pris soin d’alerter la Banque
Mondiale par un courrier électronique en date du 19 janvier 2009 (soit 2 jours avant l’incendie
déclenché à son domicile).
Selon l’enquête menée par Reporters sans frontières4, le domicile de Bruno a été rasé moins de
quatorze heures après l’incendie alors même qu’aucune expertise n’avait été pratiquée sur les lieux du
sinistre. Le corps de Bruno Ossebi n’a fait l’objet d’aucune autopsie. Tous les éléments qui auraient
permis de comprendre ce qui s’est passé dans les nuits du 20 janvier et du 1er février ont donc été
effacés. D’après le Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ)5, les autorités congolaises
refusent de fournir la moindre information sur les résultats de l’enquête ouverte le 25 février 2009.
Les associations signataires restent extrêmement préoccupées par les circonstances de son
décès, par l’inertie dont font preuve les autorités judiciaires congolaises, et par le silence des
autorités françaises s’agissant d’un ressortissant français.
Elles dénoncent le contexte de répression qui sévit au Congo-Brazzaville à l’encontre des
acteurs de la société civile.
Elles appellent Nicolas Sarkozy à s’engager personnellement pour que toute la lumière soit faite
sur cette affaire, et ce, avant la venue programmée de son homologue congolais lors des
festivités du cinquantenaire des indépendances africaines, le 14 juillet prochain.
Sherpa, Survie et le CCFD-Terre Solidaire s’inquiètent des modalités selon lesquelles le FMI et
la Banque mondiale ont décidé, le 28 janvier 2010, de procéder à l’annulation de la dette
congolaise, à hauteur de 1,9 milliard de dollars. Cette décision, véritable chèque en blanc à un
régime toujours aussi opaque et autoritaire, sonne comme une insulte à la mémoire de Bruno
Ossebi un an après sa mort.
Contacts presse:
Association Sherpa | Maître Bourdon | 06 08 45 55 46 | Maud Perdriel-Vaissière | 06 83 87 97 34
CCFD-Terre Solidaire | Jean Merckaert | 01 44 82 81 23 – 06 81 84 30 64
3 Voir sur le sujet : http://www.dette2000.org/data/File/France-Congo___Des_cadavres_dans_le_placard.pdf
4 Reporters Sans Frontières : République du Congo, Mort du journaliste franco-congolais Bruno Jacquet Ossebi : mystères
et négligences, juillet 2009
5 Comité pour la Protection des Journalistes : République du Congo: Un Incendie Mortel qui Suscite Beaucoup
d’Interrogations, Avril 2009