Communiqué de presse
Influence des entreprises

Samsung : Sherpa et ActionAid France déposent plainte avec constitution de partie civile contre le leader mondial du smartphone

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Sherpa et ActionAid France – Peuples solidaires déposent plainte avec constitution de partie civile pour pratiques commerciales trompeuses afin que soit sanctionné l’écart inacceptable entre les engagements éthiques de Samsung et les violations des droits fondamentaux des travailleur∙se∙s qui auraient été constatées dans ses usines de Chine, du Vietnam et de Corée du Sud.

Le 11 janvier dernier, Sherpa et ActionAid France déposaient une plainte simple auprès du parquet de Paris pour pratiques commerciales trompeuses contre le géant de l’électronique, Samsung Electronics France, et Samsung Electronics Co. Ltd., la maison mère coréenne.

Le 6 mars 2018, le dossier ayant été transféré à Bobigny, nos associations se heurtaient à nouveau au manque de volonté du ministère public de poursuivre des multinationales, suite à sa décision de classement sans suite, sans même avoir accompli un quelconque acte d’enquête.

Pourtant, les éléments sérieux versés à la plainte, dont de nouveaux rapports d’enquêtes très documentés de l’ONG China Labor Watch qui s’est infiltrée dans les usines Samsung, dévoileraient des violations graves des droits fondamentaux : emploi d’enfants de moins de seize ans, horaires de travail abusifs, conditions de travail et d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine. Par ailleurs, l’utilisation de benzène et de méthanol dans les usines coréennes aurait causé des maladies incurables chez plusieurs employé∙e∙s.

Le gouvernement et des tribunaux coréens, dont la Cour suprême dans une décision historique d’aout 2017, ont établi des liens entre les conditions de travail chez Samsung Electronics, et notamment l’utilisation de substances toxiques, et des maladies incurables d’ouvrier.ère.s. Malgré cette décision et les demandes de familles de travailleur.se.s décédé.e.s, Samsung refuse toujours de dévoiler la nature et la quantité des produits chimiques utilisés dans ses usines [1].  Une ONG coréenne, SHARPS, a répertorié près de 320 cas de maladies graves e 118 morts suspectes d’ancien.ne.s ouvrier.ère.s de Samsung [2].

Par ailleurs, de nouveaux éléments révèlent que les mauvaises conditions de travail et l’exposition aux produits chimiques dénoncés en Corée du Sud se retrouveraient dans les usines de Samsung au Vietnam, où l’entreprise fait produire plus de 50 % de ses téléphones[3].

Au vu de tous ces éléments, dont de nouveaux cruciaux, Sherpa et ActionAid France ont choisi de persévérer, et de déposer plainte avec constitution de partie civile au Tribunal de Grande Instance de Paris. Nos associations, qui ont un choix de compétence entre Bobigny et Paris, ne devraient pas être confrontées à un réquisitoire du parquet qui a classé sans suite deux fois cette affaire : la première fois après une enquête préliminaire se limitant à l’audition de quelques dirigeants de Samsung France, et la deuxième fois, sans même avoir effectué d’acte d’enquête.

« Alors que les multinationales utilisent ces engagements éthiques pour maintenir leur compétitivité, les ouvrier.ère.s et consommateur.trice.s sont démuni.e.s face au non-respect de ces engagements. La reconnaissance du délit de pratiques commerciales trompeuses, fondement juridique innovant en la matière, permettrait de leur donner un moyen efficace d’exiger ce respect. Cependant, ce fondement ne permettra pas l’indemnisation des victimes de ces violations : les travailleur.se.s, d’où la nécessité de leur donner une voix dans notre campagne, et de négocier un traité international sur le devoir de vigilance » déclare Marie-Laure Guislain, responsable du contentieux de Sherpa.

« Une décision ferme dans ce dossier pourrait rétablir le rapport de force déséquilibré entre travailleur∙se∙s, consommateur∙trice.s et multinationales, en rendant ces dernières responsables de leurs engagements sur le respect des droits humains dans leurs chaînes de productions » selon Héloïse Squelbut, chargée de campagne à ActionAid France.

Si Samsung entend devenir « l’une des entreprises les plus éthiques au monde »[4], elle doit pouvoir rendre compte de ses engagements devant la justice.