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Yves Rocher en Turquie : 47 ancien·ne·s salarié·e·s rejoignent l’action en justice

Paris & Istanbul, le 15 novembre 2023 – 47 ancien·ne·s salarié·e·s ont rejoint l’action en justice engagée contre le Groupe Yves Rocher pour manquement à son devoir de vigilance en Turquie.

Le 23 mars 2022, Sherpa, ActionAid France, le syndicat turc Petrol-Iş et 34 ancien·ne·s salarié·e·s d’une filiale turque du Groupe Yves Rocher ont assigné l’entreprise cosmétique en justice devant le Tribunal Judiciaire de Paris. 

Depuis, 47 nouvelles personnes ont rejoint l’action en justice. Elles reprochent à l’entreprise d’avoir manqué à ses obligations issues de la loi sur le devoir de vigilance des sociétés-mères, adoptée en 2017, en matière de liberté syndicale et de droits fondamentaux des travailleur·se·s dans sa filiale en Turquie. Les salarié·e·s soutiennent avoir subi des discriminations et des atteintes graves à leur santé et à leur sécurité, y compris des faits de harcèlement sexuel et moral. 

© Julien Askou / Action Aid France

« Le management était basé sur la pression », raconte Elif Uslu, ouvrière au département des fards de l’usine, licenciée en 2018 et l’une des nouvelles requérantes. « La pression psychologique était très forte. On était sous tension permanente pour aller vite. Des disputes éclataient à cause de ça. La violence verbale commençait d’en haut. C’était une réaction en chaîne.»

Lorsque les salarié·e·s ont rejoint le syndicat Petrol-Iş pour tenter d’améliorer leurs conditions de travail, ils et elles ont été intimidé·e·s, menacé·e·s, puis licencié·e·s par dizaines. 

« Les responsables nous ont dit : “Renoncez à votre adhésion au syndicat sinon vous ne toucherez pas un centime. L’entreprise ne veut pas de syndicat. On va vous licencier un par un.” », se souvient Hatice Durmus, ouvrière de la section de remplissage des rouges à lèvres. Güler Keles, ouvrière au département des fards, ajoute : « Chaque jour, on apprenait le licenciement de nouvelles personnes. Je voyais la pression exercée sur mes collègues, je savais que mon tour allait arriver. »

Sultan Kiliç a elle aussi rejoint l’action en justice contre Yves Rocher : « Je me suis rendue compte de mes propres droits en tant que femme, dans le travail mais aussi dans ma vie personnelle, j’ai appris à me défendre. »

L’action en justice, qui rassemble aujourd’hui 81 demandeur·esse·s, souligne à la fois le caractère structurel des manquements du Groupe Yves Rocher, qui ont affecté un grand nombre de salarié·e·s, et la nécessité de faciliter l’accès à la justice pour les personnes affectées par les activités des multinationales à l’étranger.

Selgin Kaplan, Rédactrice de la revue Femmes chez Petrol-Iş, conclut : « Grâce à cette mobilisation, à cette lutte, la participation des femmes a changé. Il ne s’agit plus seulement des conditions de travail, mais de la dignité des femmes. »

L’action en justice est aujourd’hui au stade de la mise en état, le Groupe Yves Rocher ayant soulevé l’irrecevabilité de certaines demandes. Ces questions devront être tranchées avant les débats sur le fond.

Communiqué de :
Sherpa, ActionAid France et Petrol-Iş

Pour plus d’informations : presse@asso-sherpa.org

Dernière modification: 15 novembre 2023
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