Les informations exigées par la région Ile-de-France de ses prestataires financiers vont plus loin que celles issues du volet gouvernance du Grenelle de l’environnement.
L’association Sherpa, en sa qualité de membre de la plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires, salue la décision annoncée par le Conseil régional d’Ile-de-France d’exiger de la part de ses prestataires financiers la liste de leurs entités exerçant une activité dans les paradis fiscaux. Selon William Bourdon « C’est l’expression inédite d’un pouvoir local clairvoyant sur les menaces que font peser les paradis fiscaux sur l’ordre public. Même si la liste des paradis fiscaux est insatisfaisante, c’est un pied dans la porte ».
L’association Sherpa qui suit depuis le début le processus du Grenelle de l’environnement en sa qualité de membre du Forum Citoyen pour la RSE et de l’Alliance pour la Planète, se félicite aussi de l’exigence exprimée par la région d’obtenir chaque année de la part de ses partenaires financiers un état, pays par pays portant les informations suivantes : raison sociale de leurs filiales et succursales, chiffre d’affaires, résultat de l’exercice, effectifs employés, impôts et taxes verses localement. Pour William Bourdon : « Le défi de la RSE est aussi l’affaire des collectivités locales, surtout face à la défaillance du législateur. »
Cette dernière mesure va plus loin que l’article 83 de la loi Grenelle 2 portant sur l’obligation d’information annuelle des entreprises sur leurs impacts en matière sociale et environnementale. En l’état actuel du texte, les entreprises ne sont aucunement tenues de rapporter ces informations pays par pays. Les destinataires de ces informations doivent se contenter d’informations consolidées sauf pour les installations classées pour la protection de l’environnement situées en France.
Pour les autres entités situées en France et pour filiales étrangères, le texte actuel érige la consolidation des informations en principe et la délivrance d’informations détaillées (par filiales ou par pays) en exception. Or « consolidation » ne rime pas avec « pertinence » s’agissant des informations extra-financières et permet de noyer dans la masse des informations sur de mauvaises performances sociales ou environnementales.
Alors que la commission mixte paritaire s’apprête à arrêter la semaine prochaine les termes définitifs de la loi Grenelle 2 et que le gouvernement travaille au décret d’application de son volet gouvernance, il serait regrettable que la réforme de l‘obligation d’information extra-financière soit en retrait par rapport à la mesure que s’apprête à adopter la région Ile-de- France et qui est en discussion dans d’autres pouvoirs régionaux.
Les parlementaires français et le gouvernement se retrouvent entre une région qui adopte un dispositif inédit applicable à ses partenaires financiers et l’ISO qui vient d’approuver la norme ISO 26000 sur la responsabilité sociétale des organisations. Selon Yann Queinnec, « à ses deux niveaux, local et global, l’obligation d’information pays par pays est privilégiée. La réforme française de l’obligation d’information extra-financière, qui se veut exemplaire, peut elle l’ignorer ? ». Il ajoute : « c’est le besoin croissant de connaître la qualité éthique d’une entreprise, de ses produits et services qui est en jeu. Ces informations intéressent les actionnaires, les citoyens, les consommateurs, les acheteurs publics, les investisseurs. La pertinence de l’information extra-financière est un enjeu d’avenir. Elle est amenée à faire jeu égal avec la mesure des performances financières. La région Ile-de-France s’apprête à prendre une décision qui fera boule de neige ».