Communiqué de presse
Influence des entreprises

Huile de palme au Cameroun : le groupe Bolloré attrait en justice

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Paris, le 27 mai 2019 – Alors que les plantations d’huile de palme ont rapporté 306 millions d’euros de chiffre d’affaire annuel en 2018 à Socfin, société du groupe Bolloré, ce dernier refuse de mettre en œuvre les mesures d’amélioration des conditions de vie et de travail dans ses plantations au Cameroun contenues dans un plan d’action conclu avec Sherpa en 2013.

 « L’exploitation de l’huile de palme a un impact ravageur sur la santé, la pollution, la déforestation et les droits des travailleurs mais aucune action ne semble avoir réussi à ce jour à faire bouger les pratiques des géants de l’agroalimentaire. Nos organisations se tournent donc vers le pouvoir judiciaire pour tenter de faire respecter ces droits fondamentaux » selon Sandra Cossart, directrice de Sherpa.

Aujourd’hui, dans une action judiciaire inédite, Sherpa et les organisations ReAct, GRAIN, FIAN-Belgium, Pain pour le prochain, SYNAPARCAM, FODER, SNJP, l’amicale des Riverains d’Edéa et le syndicat SATAM assignent devant le Tribunal de Grande instance de Nanterre la société BOLLORÉ S.A pour la contraindre à mettre en œuvre un plan d’action au Cameroun.

Nous demandons au juge français d’obliger le groupe Bolloré à exécuter ses engagements pris en 2013 envers les communautés riveraines et les travailleurs des plantations de la Socapalm, entreprise d’exploitation d’huile de palme au Cameroun directement liée au groupe.

En 2010, Sherpa avait déposé une plainte devant le Point de Contact National (PCN) de l’OCDE au sujet des activités de la Socapalm. Cette plainte dénonçait les violences commises par l’entreprise de sécurité embauchée par la société ainsi que les nombreux problèmes sociaux, environnementaux et fonciers. À l’issue de plusieurs mois de médiation, le groupe Bolloré et Sherpa s’étaient accordés sur la mise en place au Cameroun d’un plan d’action pour y remédier.

En décembre 2014, le groupe Bolloré avait soudainement annoncé qu’il ne ferait pas appliquer le plan d’action en se déchargeant de ses responsabilités sur son partenaire Socfin, autre actionnaire de la Socapalm.

Depuis, les communautés locales sont mobilisées mais la grande majorité des revendications restent sans réponse.

Les PCNs français puis belge ont demandé aux entreprises de respecter leurs engagements, sans succès. Ces mécanismes non contraignants de l’OCDE ont atteint les limites de leur pouvoir dans ce dossier.

Nous demandons par conséquent au pouvoir judiciaire français d’ordonner l’exécution forcée du plan d’action ; il doit être considéré comme un contrat resté non exécuté à ce jour.

« Cette action devrait être un pas important dans la responsabilisation des acteurs économiques, qui ne peuvent se libérer de façon unilatérale de leurs engagements, ni prendre ceux-ci dans le seul but d’acheter la paix sociale ou une image éthique » selon Marie-Laure Guislain, responsable du contentieux à Sherpa.

Nous espérons que les Assemblées Générales de Socfin et Bolloré les 28 et 29 mai seront l’occasion de prises de décisions des actionnaires.

En dépit des procédures en diffamation à répétition du groupe Bolloré, dont Sherpa et ReAct ont déjà été vainement les cibles dans cette affaire[1], nous revendiquons le droit d’engager la responsabilité d’une multinationale librement.

Les conditions dans lesquelles des sociétés exercent leurs activités à l’étranger en essayant de maintenir leur irresponsabilité relèvent du débat d’intérêt général.

C’est donc de façon parfaitement conforme à son objet que Sherpa, dans une procédure inédite, entend que soient tirées toutes les conséquences du refus d’un grand groupe français de respecter ses engagements.

[1] Retrouvez la tribune du 24 janvier 2018 « Face aux poursuites-bâillons de Bolloré : nous ne nous tairons pas ! » : https://www.asso-sherpa.org/face-aux-poursuites-baillons-ne-tairons

Pour plus d’information : presse@asso-sherpa.org