Communiqué de presse
Impunité des multinationales

Historique : Lafarge mise en examen et la complicite de crimes contre l’humanite retenue

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lafarge-Sherpa-Syrie

Aujourd’hui, la personne morale Lafarge SA est mise en examen sur les chefs d’accusation de complicité de crimes contre l’humanité, violation d’un embargo, financement d’entreprise terroriste et mise en danger d’autrui, en plus des huit anciens dirigeants de Lafarge déjà mis en examen dans cette affaire. Cette décision historique doit décider Lafarge à prendre ses responsabilités et à ouvrir un fonds d’indemnisation indépendant afin que tous les anciens employés voient leurs préjudices réparés.

C’est la première fois dans le monde qu’une entreprise est mise en examen pour complicité de crimes contre l’humanité, ce qui marque un pas décisif dans la lutte contre l’impunité des multinationales opérant dans des zones de conflits armés. En France, il s’agit aussi de la première fois qu’une multinationale, maison mère, est mise en examen pour les activités de l’une de ses filiales à l’étranger.

Sherpa et le « European Center for Constitutional and Human Rights » (ECCHR), à l’origine de la plainte avec 11 anciens salariés contre Lafarge, ont adressé en ce sens une note aux magistrats, le 11 mai dernier, dans laquelle elles considèrent la mise en examen de la personne morale pour complicité de crimes contre l’humanité, à ce stade de l’information judiciaire, inéluctable.

Dans cette note, Sherpa et ECCHR expliquent pourquoi les crimes commis par l’Etat islamique (EI) dans la région nord-est de la Syrie entre 2013 et 2015 doivent être qualifiés de crimes contre l’humanité. Lafarge se serait rendue coupable de complicité de ces crimes en finançant l’EI et en n’assurant pas la sécurité de ses salariés.

Le chef d’accusation de complicité de crimes contre l’humanité revêt une importance fondamentale en ce qu’il permet d’appréhender le rôle des acteurs économiques dans les conflits armés.

« La mise en examen de Lafarge est un pas historique dans la lutte contre l’impunité des multinationales dans laquelle Sherpa est engagée depuis 17 ans. Cette affaire doit créer un précédent pour toutes ces entreprises qui alimentent des conflits armés. L’accès à la justice de milliers de victimes de pays en guerre, dont les plaignants syriens, en dépend », affirme Sandra Cossart, directrice de Sherpa.

« Les activités de Lafarge en Syrie, dans un contexte où des crimes extrêmement violents ont été commis, y compris au pied même de l’usine, sont l’illustration parfaite de comment les multinationales peuvent alimenter les conflits et violations des droits humains. Que la justice reconnaisse enfin l’étendue et la gravité de ces allégations est absolument historique, et une avancée de plus pour les plaignants »,  selon Dr. Miriam Saage-Maass, directrice juridique du ECCHR.

Demande de l’ouverture d’un fonds d’indemnisation

Au vu de cette mise en examen historique, des avancées notables de l’instruction et des perspectives de jugement de Lafarge, nos associations demandent à l’entreprise d’ouvrir un fonds d’indemnisation pour tous les ex-employés de LCS (Lafarge Cement Syria, filiale de Lafarge en Syrie) et leurs familles.

Qu’ils soient encore en Syrie ou réfugiés dans le monde, les anciens employés de LCS doivent recevoir une indemnisation de leur préjudice moral et matériel pour pouvoir se reconstruire.

Ce fonds d’indemnisation, qui devra être géré par un organisme indépendant, impartial et transparent, ne saurait empêcher les parties civiles de demander à la justice française de se prononcer, aux côtés de nos associations, sur les chefs d’accusation de notre plainte.

Nous demandons donc que Lafarge prenne ses responsabilités vis-à-vis de ses anciens salariés et mette rapidement en place l’ouverture d’un fonds d’indemnisation qui leur soit destiné.

Communiqué de :

Sherpa et European Center for Constitutional and Human Rights (ECCHR)

Pour plus d’informations : presse@asso-sherpa.org